On peut pas être au four et au moulin...

Chargée de mission par la Castelmémère, la teutonne bonne, la camériste triste, la chambrière pas peu fière d'avoir enfin un rôle d'importance à jouer, celui de messager, de porte-parole, de héraut, de coursier, d'intermédiaire, bref, en un mot, parce qu'on avait déchargé sur elle quelqu'ennuyeuse tâche, Judtta courrait de toute la puissance de sa masse flasque et garnie à travers le domaine de Chablis, pour débusquer Gros Gimont qui devait répondre à une question d'importance - et c'est le nez dans le four, à récurer les miettes des serfs partis avec leur pain, après la fournée de ce dimanche, qu'elle le trouva.

-« Gimônt ! Gimônt ! Y'a eul' maîtrrrrressse Jehanne qu'est là qu'demande si c'est y qu't'as ouvert l'caveau et l'tombe pour eul'pauv'duchesse ? »

PNJ Nombre de messages : 18 Date d'inscription : 14/04/2007

Pauvre Gros Gimont…dès qu’il veut se mettre à manger la harpie s’met à brailler : Gros Gimont ! Gros Gimont ! Grooos Gimooont !...
Et patati et patata toute la journée ça n’arrête pas. Faut faire le feu et le ménage, le repassage, le lavage, c’est vraiment de l’esclavage. Il faut tout le temps tout le temps travailler sans jamais jamais s’arrêter pour une harpie qui crie qui crie : « C’est pas fini ! »

-« Gnoupf… L’caveau ? Ben la boite elle est ouverte j’crois ben, sauf si l’penot il l’a r’fermer pour faire un somme dedans. Pourquoi tu demande ça ? »

La camériste put jurer ses grands dieu en germain, à coup de "Drecksack", "Mist", "doove Kuh" et autres noms puants - elle botta le train au Gimont, avec la même vigueur qui anime les Corses lorsqu'ils tentent d'assomer un âne à coup de figues molles.

-« S'eul dorrrt c'est y ben qu't'vas l'rrréveiller, l'Gimont, pasqu'le P'lot, faut pas qu'y prrrenne eul'place d'eul pauv'duchesse. Pis faut prrréparrrer eul'capelle maint'nant qu'parrrraît qu'on peut rrrr'faire des messes dedans. Et euh pis moi faut qu'euh j'ale ferrrmer eul boîte d'eul duchesse, mais c'est y qu'tu vas t'dépêcher, hein, l'Gimont ? »

Et tout en redressant le factotum de sa quête minutieuse par une habile préhension de son col, la camériste se pencha pour satisfaire elle aussi sa gourmandise mal placée, des fois qu'on ait fait cuire de la brioche dans le four le matin même...

PNJ Nombre de messages : 18 Date d'inscription : 14/04/2007

On ne peut pas toujours avoir raison, surtout quand la camériste est d’un avis contraire. Sans faire plus d’histoire, Gimont gagna la chapelle afin de la remettre en état.

Trente-six, trente-sept, trente-huit, trente-cinq, trente-…huit…neuf…enfin pas loin en tout cas. Les disposer la moitié sur l’autel, et le reste sur les bougeoirs et présentoirs décorant la bâtisse.

D’abord vingt…cinq sur l’autel, et puis le reste là, et là et…rah ! Il en manque quatre ! Enfin cinq quoi, comme les doigts bouffis de la main de Gimont, pas difficile à s’en rappeler.

Tournant son bedonné bedon en direction de la sortie de la chapelle, le factotum soupira profondément. La vie à Chablis était bien calme ces temps-ci, exception faite de l’animation créée grâce à la mort de la Dame… Enfin paix à son âme, bien sûr.

Plus de grande réception, plus d’entrainement de joute, plus de raison d’écouter aux portes. En un sens, la vie était aussi plus facile, mais Gimont était un véritable aventurier au fond de lui, quelqu’un qui a besoin d ‘action, un…

-« ARRRGGGGGG UN RAAT ENOOOORME ! »

Et de courir vers la porte.